C'est la plus grande épreuve de l'histoire du Concours Eurovision de la chanson: huit mois avant la 70e édition du plus grand concours musical au monde, prévue à Vienne, un différend concernant la participation d'Israël menace la participation de certains pays, dont l'un des "big five".

L'Espagne, l'Irlande, les Pays-Bas, l'Islande et la Slovénie menacent plus ou moins définitivement de se retirer si Israël participe, et d'autres pays hésitent.

Comment justifier ces menaces de boycott ?

La principale justification concerne les attaques répétées d'Israël dans la bande de Gaza. Cette critique s'était déjà manifestée très clairement lors des deux dernières finales de l'Eurovision Song Contest (ESC) à Bâle en Suisse, et en Suède. À Malmö, en 2024, des manifestations violentes ont rassemblé plusieurs milliers de participants. À Bâle, en mai dernier, les manifestations ont été moins importantes, mais des critiques ouvertes contre Israël et des manifestations de solidarité avec la population de Gaza ont eu lieu.

Y a-t-il d'autres critiques ?

Les résultats étonnamment bons de la candidate israélienne Yuval Raphael à Bâle ont donné lieu à des accusations de manipulation. Classée seulement 15e par le jury, l'Israélienne a remporté de manière tout à fait surprenante le vote du public. Cela a suscité dans de nombreux pays des doutes quant à la régularité du vote. L'Union européenne de radio-télévision (UER) n'a jusqu'à présent trouvé aucune preuve de manipulation. Israël semble avoir bénéficié d'une campagne publicitaire coûteuse sur les réseaux sociaux.

Quelles conséquences ?

Le nombre de participants, qui était de 37 pays lors de la dernière édition, pourrait diminuer considérablement. Cinq pays semblent déjà avoir définitivement renoncé à participer si Israël est présent. Outre l'Espagne, l'Irlande, l'Islande, la Slovénie et les Pays-Bas, d'autres participations seraient également incertaines. La Belgique, par exemple, a déjà évoqué son retrait après la finale de Bâle pour 2026.

Pourquoi l'annonce de l'Espagne est-elle si délicate ?

À l'instar de l'Allemagne ces dernières années, l'Espagne a souvent obtenu des résultats décevants lors de la finale de l'Eurovision Song Contest. Les téléspectateurs espagnols comptent néanmoins parmi les fans les plus passionnés du concours. L'Espagne fait également partie des Big Five, les cinq grands pays contributeurs financiers de l'ESC. Si l'Espagne venait à boycotter le concours, ce ne sont pas seulement des millions de téléspectateurs qui manqueraient à l'appel, mais aussi beaucoup d'argent pour ce concours coûteux.

Quand les menaces de boycott seront-elles tranchées ?

En décembre, l'UER se prononcera sur la participation d'Israël lors de son assemblée générale. "Nous comprenons les préoccupations et les convictions profondes concernant le conflit qui perdure au Proche-Orient", a déclaré Martin Green, directeur du Concours Eurovision de la chanson.

Cependant, lors des deux dernières finales de l'ESC, l'Union européenne de radio-télévision a semblé dépassée par la tâche qui consistait à maintenir la politique à l'écart du concours et à parvenir à un consensus entre les pays participants. L'issue d'un processus de consultation sur Israël lancé par l'UER semble totalement incertaine.

L'ESC se veut neutre et apolitique. Mais il n'a jamais pu se dissocier de la politique mondiale. Suite à l'attaque russe contre l'Ukraine, la Russie n'est désormais plus autorisée à participer. En 1975, le conflit chypriote a conduit au boycott de la Grèce.

En 1979, la Turquie a renoncé à participer à la finale pour protester contre l'action d'Israël au Proche-Orient. Dans le sillage des guerres des Balkans, l'UER a pris des mesures particulièrement sévères à l'encontre de la Serbie et de son président de l'époque, Slobodan Milosevic. Cependant, il n'y a jamais eu de conflits d'une telle ampleur que cette année.

Il s'agit d'une véritable épreuve pour le concours musical le plus regardé au monde.